La France, un des Etats les plus corrompus d’Europe, constate Transparency International
Auteur : © Jean-Patrick Grumberg pour Dreuz.info. | Editeur : Walt | Mercredi, 14 Oct. 2015 - 15h15
La corruption des élus politiques
français bénéficie d’un contexte structurel profondément immoral qui
n’est pas fait pour lutter contre cette faiblesse bien humaine, mais
pour protéger les copains et les coquins, cacher les petites combines
juteuses, entretenir les privilèges des uns, au détriment des payeurs
qui souvent se saignent, voilà ce qui ressort du dernier rapport de
Transparency international « agir contre la corruption ».
Premier constat douloureux : pour cacher
la corruption, la France « n’a pas créé la base de données publique
essentielle qui recense les condamnations pour corruption » déplore le
rapport, et permettre à chaque contribuable de recevoir l’information à
laquelle il a droit. Cela, dans une hypocrisie ambiante de débauche de
« solidarité citoyenne. » Solidarité oui, mais pas touche aux élus.
Second constat : « Il est donc très
difficile d’avoir, en France, une vision précise des formes que prend la
corruption », au point que Transparency France a dû faire appel à des
bénévoles pour dresser la carte de la corruption, et que l’ONG lance un
appel au public : « Aidez-nous à enrichir la base de données en nous
adressant les décisions de justice dont vous avez connaissance » car
« nous avons besoin de vous pour connaître les condamnations qui
n’apparaissent pas encore sur notre carte, » expliquent-ils.
Les mairies savent trouver de l’argent
pour des projets électoralistes et acheter les voix des uns avec
l’argent des autres, mais pour financer la lutte contre la corruption,
il n’y a plus personne…
Une culture de l’impunité dans laquelle la corruption prospère
Troisième constat : une justice complaisante, voire complice.
« Ce qui a le plus frappé nos bénévoles?
La durée des procédures: 45 affaires ont un délai > 15 ans entre les
faits et la condamnation » constate l’ONG.
15 ans entre les faits et la
condamnation, la justice est généreuse avec les ripoux : elle leur
laisse tout le temps pour s’organiser, accumuler un petit pactole sur le
dos des contribuables, étouffer les affaires et enfouir leurs détails,
perdre quelques dossiers, et pourquoi pas, jouer sur la mort naturelle
de quelques témoins ou acteurs gênants, sans compter sur l’immense
bénéfice que le temps offre à l’effacement des mémoires. C’est dans
cette culture de l’impunité que la corruption prospère.
« Avoir accès à ce type de données est
pourtant essentiel pour savoir quels sont les domaines, régions et
catégories de personnes les plus vulnérables et, ainsi, éclairer
l’action des acteurs de la lutte contre la corruption (pouvoirs publics,
citoyens, ONG, médias) ».
Pots de vin, prises illégales d’intérêts, les maires épinglés
Quatrième constat : En France, on déteste les patrons, mais les vrais ripoux, ce sont les maires
Europe 1, qui a étudié en détail le
rapport, note que « les maires sont les personnes les plus condamnées,
surtout pour des affaires relatives à l’attribution de marchés
publics », « deux fois plus que les patrons », précise la radio.
Le scandale Kader Arif, l’arbre qui cache la forêt
Pour autant, le contrat du ministère de
la défense qui a fait tomber Kader Arif, l’ancien ministre des anciens
combattants, est une paille dans une botte de foin. « Les chiffres ne
portent … que sur les affaires dont nous avons eu connaissance », nuance
Transparency France qui laisse entendre que la réalité est par essence
difficile à cerner, puisque précisément il s’agit d’affaires illégales,
secrètes et bien cachées.
Conclusion
Transparency France fait un travail
indispensable et qu’il convient de saluer. Mais l’ONG pourrait elle-même
faire preuve d’un peu plus de transparence.
- Il est regrettable que la base de donnée ne permette pas d’afficher
un tableau avec les noms des ripoux en clair, et les villes où ils
exercent leur vice. Il faut, pour les trouver, faire une recherche
extrêmement longue département par département, et une suite de copiés
collés impossibles.- Il serait bon, également, puisque l’étude fait une distinction entre la situation des pays émergents et celle des pays industrialisés, que les tableaux reprennent cette distinction. C’est cette lecture qui m’a révélé que la France avant d’être 26e sur la liste, est surtout parmi les pays d’Europe les plus corrompus.
- Où sont les chiffres ? Pour mesurer l’ampleur de la corruption, il faut ses chiffres. L’indispensable classement par le nombre de condamnation ne permet pas de visualiser l’ampleur des dégâts. Un procès pour une corruption de 3 000 euros, ce n’est pas la même chose qu’un autre pour 300 000.
A la tête du Théâtre National de
Strasbourg, le gendre de Jack Lang vient de remplacer la nièce de
Martine Aubry. Aucun contribuable n’a été dépouillé, aucun logement
(encore que) destiné aux défavorisés n’a été détourné, et pourtant, nous
sommes en plein cœur d’un système oligarchique, d’un népotisme qui
représente une forme de corruption jamais sanctionnée – sauf lorsqu’il
s’agit de dénoncer Nicolas Sarkozy bien entendu (il a du renoncer à
installer son fils Jean à la tête de l’EPAD lorsque les médias en ont
fait à juste raison tout un fromage. Cela n’a pas empêché le
gouvernement socialiste de choisir Amin Khiari, fils de la
vice-présidente PS du Sénat pour diriger le même EPAD, en comptant sur
la complicité des médias, qui pour une fois n’ont pas cédé.)
- Source : © Jean-Patrick Grumberg pour Dreuz.info.
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